Dans le cadre du Phénix Festival, Matias Chebel a créé un magnifique spectacle (ex)Ode, en 7 langues, rendant hommage à sa famille et à toutes les migrations. Ce spectacle plein d’émotions nous a touché par sa délicatesse et sa sensibilité. Un spectacle à ne pas manquer à la Nouvelle Seine le 13 juin !

Quelle est l’origine de ce projet ?
J’avais travaillé pendant quelques années sur le territoire du Creusot où se trouve l’écomusée du Creusot-Montceau. Ce musée est un lieu d’exposition, de conservation et de recherche visant à mettre en avant la civilisation industrielle. Devenu un partenaire de ma compagnie, nous avions commencé à faire tout un travail de recherche sur la mémoire des migrations.  Le Creusot a accueilli énormément de main d’œuvre étrangère par suite de la présence des usines Schneider dès 1880. Aujourd’hui, l’industrie est moins présente. L’automatisation a  fait son œuvre mais la mémoire des migrants très présente car tous leurs descendants vivent sur ce territoire. Ainsi, notre travail de mémoire a duré 3 ans.  On est allé chercher chaque ligne migratoire, chaque nationalité afin de connaitre le moment où chaque communauté est arrivée. A la fin de ce cycle de 3 ans de recherche on a créé un spectacle qui s’appelait « traçage ». Il y a eu ensuite une expo assez vaste qui continue de sillonner le territoire. La direction de l’écomusée a voulu organiser un colloque scientifique pour clore tout ce cycle de travail sur la migration. Ce colloque durait 2 jours et elle m’a proposé d’animer la soirée. Le spectacle est né de cette commande toute simple.

Mathias Chebel

Comment avez-vous intégré l’histoire de votre famille à ce spectacle ?
J’avais interviewé énormément de descendants de migrants qui possédaient beaucoup d’histoires qu’ils tenaient de leurs ancêtres.  Personnellement, en tant que migrant je n’avais jamais pris la parole. Et j’avais envie de rendre hommage à toutes les migrations et le meilleur format allait être une odyssée musicale où j’allais livrer tout mon parcours de migration en chantant la diaspora, aux parcours de migration. En recherchant l’histoire ma famille je me suis rendu compte que nous sommes 4 générations de migrants qui se suivent jusqu’à l’histoire de mon arrière-grand-père qui est parti du Liban. Grâce à ce spectacle j’ai pu renouer avec mes racines libanaises. Ce sont des familles dont on n’avait plus de nouvelles depuis le début du XXe siècle. Une fois le spectacle créé, j’ai pu me rendre au Liban.

Quelles sont langues chantées dans ce spectacle ?
J’ai 4 origines différentes, étant argentin. Je chante en 7 langues : l’ava (langue de mes ancêtres), l’espagnol, l’italien, le libanais, le portugais galicien, l’arabe et le grec Lorsque j’ai monté mon premier spectacle, nous avions ces images de corps qui s’échouaient sur les cotes grecques J’ai trouvé ça tellement paradoxal que le berceau de l’humanité soit aujourd’hui le cimetière de tous ces migrants. Je voulais chanter pour leur rendre hommage et c’est pourquoi je chante en grec. Je mesure ma chance étant un migrant ayant été accueilli de façon très confortable en France, suite à la crise politique, économique et sociale survenue dans mon pays.

Quel est l’accompagnement musical ?
J’ai la chance d’avoir 2 super musiciens qui ont tout de suite adhéré au projet.  Marc Vorchin, qui est antillais, joue du saxophone, de la flute, de la clarinette et des percussions et Elie Maalouf, d’origine libanaise, joue du piano, du Buzuq et des percussions. Elie Maalouf,  de par ses origines, constitue le lien commun qui nous unit dans ce projet. 

Propos recueillis par Laurent Schteiner

 

 

 

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