A l’occasion de la rentrée au Théâtre de l’Odéon, Olivier Py s’attaque au mythique « Roméo et Juliette ». Il nous propose une mise en scène originale et surprenante. La tragédie prend ici le pas sur le romantisme, et nous sommes plongés dans une atmosphère froide pour mieux ressentir la douleur des amants maudits de Vérone. Une version nouvelle de cette histoire qui a le mérite de nous étonner mais qui n’a pas toujours celui de nous émouvoir.


Dès le début, les comédiens nous invitent dans un univers différent de l’interprétation collective de cette pièce. Nous sommes immergés dans un décor sombre où règnent le noir et le blanc. Cette dualité persiste au fil du texte puisque l’on oscille en permanence entre des émotions opposées. Alors que les moments les plus intenses sont soulignés par un pianiste, les mots de Shakespeare n’en sont que plus beaux et le spectateur se laisse emporter. Paradoxalement, Olivier Py réussit souvent à ces mêmes moments le pari d’intégrer beaucoup d’humour. Malheureusement c’est quelquefois trop surprenant et le spectateur se retrouve un peu perdu, parfois même gêné de rire.


Une scénographie précise relie en permanence l’ombre à la lumière comme pour mieux mettre en avant la proximité entre la mort et la vie. Le plateau noir est éclairé par un immense mur de néons, une lumière très blanche qui évoque la mise à nu, la faiblesse de l’homme face aux sentiments. Tout peut basculer si vite, les amants passeront de l’euphorie de la rencontre à la désespérance la plus totale. Les instants clés de leur histoire sont accentués par un voile rouge qui symbolise autant l’amour que le sang. Un décor constitué d’énormes blocs sombres évolue au fur et à mesure, à la vue des spectateurs, et crée un fondu très esthétique.


Grâce à une mise en scène axée sur le travail du corps, ainsi que le soutien de la musique très présente, certains tableaux prennent des allures de danse contemporaine. Olivier Py essaie de s’écarter au maximum de tout ce que l’on assimile généralement à « Roméo et Juliette ». Il prend du coup le parti de privilégier le corps à l’esprit dans la relation amoureuse. Ainsi les amants apparaissent plus charnels et sensuels. Juliette nous semble moins naïve, plus forte, mais du coup elle en est souvent moins touchante. La relation entre Roméo et Mercutio est présentée comme assez tangente. Là encore, les corps parlent plus que les mots, et l’amitié peut elle aussi basculer très vite.


On notera cependant la très belle performance de Matthieu Dessertine qui nous offre un Roméo profond, tourmenté. Le jeune comédien joue avec beaucoup de nuances et fait preuve d’une justesse époustouflante. D’autres personnages tels que la nourrice ou encore Mercutio se détachent aussi par leur talent. Toutefois on reste quelque peu partagé, une impression d’égarement persiste comme si à force de chercher un nouveau regard sur ce mythe , on passait à côté de l’essentiel.

Audrey Jean


Roméo et Juliette de William Shakespeare

Mise en scène d’Olivier Py


avec

Olivier Balazuc (Capulet), Camille Cobbi (Juliette), Matthieu Dessertine (Roméo), Quentin Faure (Tybalt), Philippe Girard (Frère Laurent), Frédéric Giroutru (Mercutio), Mireille Herbstmeyer (la nourrice), Benjamin Lavernhe (Benvolio) et Barthélémy Méridjen (le Prince)

crédits photo : Alain Fonteray

Théâtre de l’Odéon

Place de l’Odéon

75006 Paris

loca : 01 44 85 40 40

du 21 sept au 29 oct 2011

du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h

www.theatre-odeon.eu

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