Olivier Borle porte haut la parole d’Aimé Césaire dans une partition d’une extrême complexité « Cahier d’un retour au pays natal ». Une approche sobre de l’écriture viscérale du dramaturge antillais servie avec précision par ce comédien remarquable. A découvrir jusqu’au 4 Avril au Théâtre de l’Opprimé !

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« Au bout du petit matin… »

Forme indéfinie « Cahier d’un retour au pays natal » se veut poème, manifeste, essai et récit à la fois. Loghorrée infatigable à la mélodie si délicate c’est un texte particulièrement difficile à mettre en scène mais qui porte en lui une théâtralité animale, fruit de l’écriture poétique et virulente de Césaire. Magistral, Olivier Borle l’aborde avec énormément d’humilité et prend comme point de départ cette langue brute, lourde s’attachant avant tout à en travailler les sonorités. C’est donc sa voix qui entame le voyage. Et qu’elle est belle cette voix, envoutante et nuancée elle guide le spectateur dans ces contrées lointaines. On se raccroche à ses inflexions, à sa musique lorsque l’on perd le sens de cette diatribe aussi complexe que le vaste sujet qu’elle traite. Avec ce texte déversoir Césaire transcende la question de l’esclavagisme et offre une vision globale du traitement de la colonisation. Mais le comédien rend à ce poème sa visée initiale à savoir un regard plus large sur la condition humaine, un plaidoyer pour l’universalité de la quête d’identité. En vrac, dans un flot continu, Olivier Borle s’empare alors de ses mots, s’empare de la négritude même et fait exploser son essence sans autre artifice que son phrasé affuté. La peau change de couleur mettant en lumière un corps seul au service de ce rythme unique. En fond de plateau, au lointain,  le monde se dessine à la craie noire et voit dans un cercle diffus se joindre les Antilles. Le rêve ultime de Césaire prend forme et laisse sur les mains blanches d’Olivier Borle un résidus de cendres, une empreinte indélébile.

Audrey Jean

« Cahier d’un retour au pays natal » d’Aimé Césaire
mis en scène et interprété par Olivier Borle

Collaboration artistique Clément Carabédian
Compagnie du Théâtre Oblique

Jusqu’au 4 Avril
Du mercredi au samedi à 20H30

Théâtre de l’Opprimé
78/80 rue du Charolais

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