Avec plusieurs dates de tournées, Matthieu Roy nous gratifie en ce moment d’une reprise d’une de ses premières créations « L’amour conjugal », l’occasion de découvrir les prémices de sa recherche sur l’écriture, une expérimentation consacrée avec le triptyque « Visage(s) de notre jeunesse ». Tandis que la thématique abordée est plus légère que sur ses récents spectacles c’est le rapport à la forme littéraire ainsi que la démarche même d’écrire qui sont ici questionnées par la Compagnie du Veilleur.

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« L’Homme – Je me rendais compte que deux choses seulement pouvaient me sauver : l’amour d’une femme et la création artistique. Il me semblait avoir droit à l’amour comme tous les autres hommes sur terre et quant à la création artistique j’étais convaincu d’y être porté par la nature de mes goûts et par un talent q ue, dans mes moments d’optimisme, je croyais posséder. » 

Silvio et sa femme Léda forment un couple pour le moins atypique. Silvio se qualifie comme un esthète et analyse assez froidement son rapport à son épouse, d’un beauté singulière et de culture médiocre dira-il. Pour promouvoir son couple au rang d’une Å“uvre d’art, il entreprend d’en écrire l’histoire convaincu d’avoir un certain talent d’écrivain. Mais pour ce faire, le couple s’isole dans une villa en Toscane et se soumet à l’épreuve de l’abstinence révélant ainsi ses propres faiblesses et toute la complexité de l’amour conjugal.

Cette création se distingue avant tout par un dispositif scénographique original et particulièrement judicieux face à ce thème de l’intimité du couple. Le public dispersé dans un espace bi-frontal est équipé de casques audios au travers desquels leur parviendront le texte mais également la multitude de sonorités liées au quotidien du couple, en l’occurence ici le repas qu’ils partagent, traditionnel moment familial de l’échange. Une sensation d’étrangeté est ainsi démultipliée conférant au spectateur un rôle de voyeur, tandis que les bruits de vaisselle, de mastication et les odeurs de nourriture lui parviennent amplifiés par les casques. Si le sujet parait plus banal que d’ordinaire chez la Compagnie du Veilleur, rappelons que les dernières créations de Matthieu Roy s’attaquaient au phénomène de la radicalisation religieuse au encore du suicide adolescent, le traitement du rapport à l’écrit littéraire et une forme de symbiose avec le texte liée à la spatialisation du son, rappellent les fondamentaux de son travail de recherche. L’expérimentation autour de la théâtralisation d’une Å“uvre littéraire à savoir ici le roman d’Alberto Moravia, la direction d’acteur ainsi que la gestion de leurs mouvements sur le plateau renforcent la faiblesse du texte par endroits, notamment au niveau de la multiplicité des langues et des adresses selon un langage dialogué ou plus intime. Cette forme courte reste étonnante à découvrir et constitue bien après sa création en 2008 une réelle expérimentation scénique. « L’amour conjugal » se jouera du 30 Mars au 2 Avril à la Scène nationale de Saint-Quentin en Yvelines.

Audrey Jean

« L’amour conjugal » d’après le roman d’Alberto Moravia 

Adaptation et mise en scène de Matthieu Roy

Traduction Claude Poncet

Avec  Johanna Silberstein et Philippe Canales

Une production Compagnie du Veilleur

Du 30 Mars au 2 Avril
Scène Nationale de St-Quentin en Yvelines 

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