Auréolée d’ un très beau succès et d’une double nomination aux Molières la saison passée l’adaptation de « L’école des femmes » par Philippe Adrien est de retour au Théâtre de la Tempête jusqu’au 2 Octobre. Une nouvelle occasion de redécouvrir un texte intemporel caractérisé ici par une distribution remarquable.

ecole-des-femmes-615_antonia-bozziEn secret Arnolphe a pris bien soin d’élever sa pupille la jeune Agnès dans l’isolement et la naïveté la plus totale afin de modeler une épouse future parfaite. Soumise, fidèle, pieuse et obéissante telles sont les qualités primordiales qu’une femme devrait en effet posséder selon lui. Mais pendant l’un de ses absences, Agnès rencontre le fougueux Horace et à son contact la jeune femme s’ouvre progressivement à de nouvelles expériences. Fou d’amour Arnolphe voit la candide lui échapper sans pour autant pouvoir la condamner tout de go. Agnès s’émancipe avec un naturel et une innocence telle, Horace éprouve lui-meme des sentiments si purs que la situation vire au quiproquo inextricable poussant de plus en plus Arnolphe dans ses retranchements. Jusqu’où ira-t-il pour assouvir sa passion ?

Comme a son habitude c’est un spectacle de très belle facture, extrêmement soigné  que nous propose Philippe Adrien avec « L’école des femmes ». Le travail sur l’oralité de la langue de Molière y est remarquable et Philippe Adrien se révèle être une fois de plus un excellent directeur d’acteurs. La distribution fait en effet la part belle aux seconds rôles avec des compositions magistralement orchestrées pour Joanna Jianoux et Gilles Comode par exemple, couple de paysans au langage corporel fleuri, chiadé et somme toute hilarant. Pierre Dot et Vladimir Ant, respectivement Chrysalde et Oronte ne sont pas en reste, délivrant également quelques scènes d’anthologie. Raphael Almosni  quant à lui s’illustre magistralement dans le rôle du notaire à grands renforts de postures jubilatoires. Ces personnages permettent de faire basculer la pièce dans le registre de la farce en de nombreux endroits mais Philippe Adrien n’en oublie pas pour autant la noirceur de la situation d’Agnes. Sans jamais tomber dans une caricature Patrick Paroux nous montre ainsi toute la complexité du rôle d’Arnolphe, provoquant de nombreux sentiments contraires à son égard chez le public. Il en devient touchant cette homme dont les mots parfois détestables nous hérissent, malgré tout il finit par nous attendrir tant sa passion pour Agnes, sa folie d’amour lui fait perdre tout sens commun. Mais le calvaire d’Agnes est réel, la mise en scène teintée de mélancolie de Philippe Adrien laisse éclore la jeune femme, l’accompagnant progressivement dans cette quête de liberté nous permettant de découvrir toute la palette de jeu de Valentine Galey, nominée par ailleurs pour cette prestation aux Molières. Pierre Lefebvre complète le trio avec la magnifique poésie qui le caractérise, la fraicheur de son interprétation équilibre parfaitement le spectacle. Visuellement la pièce est d’ailleurs tout aussi aboutie, le décor  oscille entre le charme bucolique d’un jardin au printemps et la noirceur de l’enfermement derrière les hautes façades sombres. La scénographie laisse planer par moments cette atmosphère mystérieuse propre aux créations de Philippe Adrien, cette ambiance étrange évoquant le songe ou le cauchemar c’est selon. Sur ce très beau plateau dont les décors sont signés Jean Haas les lieux de l’action sont divers, démultipliés, tout l’espace scénique est ainsi réquisitionné offrant de nombreuses possibilités de jeu dont les comédiens se délectent à n’en pas douter. Une réussite incontestable !

Audrey Jean

« L’école des femmes » de Molière 
Mise en scène de Philippe Adrien

Avec Patrick Paroux, Valentine Galey, Pierre Lefebvre, Joanna Jianoux, Gilles Commode, Pierre Diot, Raphael Almosni et Vladimir Ant

Jusqu’au 2 Octobre
Du mardi au samedi à 20h
Le dimanche à 16h

La Tempête
Cartoucherie de Vincennes  

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