Robert Carsen nous convie à la Comédie Française à « traverser » la Tempête de Shakespeare. Une Tempête calme caractérisée par la mélancolie et le pardon. Cet oxymore donne le ton à cette fable où rédemption et pardon se conjuguent aux sentiments les plus abrupts. Cet étonnant mélange est la vie ! Une vie agitée de rêves et d’espoirs avant de sombrer dans un sommeil éternel.  La mise en scène de Robert Carsen insuffle à cette tempête le souffle d’une création léchée et généreuse.

 Prospero, Duc de Milan a été destitué il y a 12 ans et jeté avec sa  fille Miranda dans une barque. Echoués tous les deux sur une ile déserte, ils changent de vie s’associant à l’esprit des airs, Ariel. Quand son frère Antonio, usurpateur qui l’a chassé du pouvoir longe les côtes de l’ile en compagnie d’Antonio Roide Naples, Prospéro déclenche une tempête faisant chavirer le navire. Les naufragés sont alors disséminés dans l’ile. Ferdinand, le Prince de Naples que son père Alonso croit mort rencontre Miranda. Les deux jeunes gens tombent instantanément amoureux l’un de l’autre. Antonio incite son frère Sébastian à assassiner son frère pour s’emparer du trône. Mais Ariel veille…


La Tempête par essence  est l’une des pièces les plus abouties de Shakespeare. Le spectateur est projeté dans une aventure où les accents politiques et humains constituent la face visible de l’intrigue. Mais ne sommes-nous pas dans l’univers mental de Prospéro, figé dans un passé qui a vu sa perte et assoiffé de vengeance ? Une société froide, sans âme et avide de revanche. Cette pièce, que Machiavel n’aurait pas reniée, met également l’accent sur un Prospéro machiavélique qui entend créer une autre société à sa seule image.

La scénographie dans la mise en scène de Robert Carsen est essentielle faisant la part belle à un certain dépouillement. Une boite blanche fermé comportant en son fond un écran où sont projetées en boucle des images de l’océan.  D’emblée, le spectateur est projeté sur cette ile nue. Cette nudité étouffante tranche avec les aspérités politiques de ces hommes de pouvoir qui continuent à se quereller dans un univers dépourvu de tout. Le texte délicieusement drôle servi par Trinculo (Hervé Pierre), Caliban (Stéphane Daruppenne),  fait écho aux effets comiques inattendus de la mise en scène. Michel Vuillermoz est prodigieux et incarne un Prospéro complexe et impénétrable. Si cette pièce s’achève sur une note de liberté et sur la fin d’un monde, pouvons-nous vraiment y croire ?

Laurent Schteiner
 
La Tempête de William SHAKESPEARE
Mise en scène de Robert CARSEN
Teste de Jean-Claude CARRIERE

Avec Thierry HANCISSE, Jérôme POULY, Michel VUILLERMOZ, Elsa LEPOIVRE, Serge BAGDASSARIAN, Hervé PIERRE, Loïc CORDERY, Gilles DAVID, Stéphane VARAPURENNE, Georgia SCALLIET, Benjamin LAVERNHE, NOAM MORGENSZTERN et Christophe MONTENEZ

 en alternance : Serge BAGDASSARIAN, Michel VUILLERMOZ

et les comédiens de l’Académie de la Comédie Française
Matthieu ASTRE, Robin GOUPIL et Alexandre SCHORDERET

 

  • Scénographie : Radu BORUZESCU
  • Costumes : Petra REINHARDT
  • Lumières : Robert CARSEN et Peter Van PRAET
  • vidéo : Will DUKE
  • Son : Léonard FRANCON
  • dramaturgie : Ian BURTON
  • Collaboration à la mise en scène : Christophe GAYRAL
  • Assistanat à la scénographie : Philippine ORDINAIRE
  • © Vincent PONTET

La Comédie Française
Place Colette
75001 Paris
www.comedie-francaise.fr
Tel : 01 44 58 15 15
Places de 5 € à 42 €
Représentations en alternance du 9 décembre au 21 mai 2018 : soirées à 20h30, matinées à 14h
 

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