C’est la reprise parisienne pour  « Le Malade imaginaire » dans une mise en scène jubilatoire de Michel Didym. Porté par une distribution éclatante et un respect absolu du verbe de Molière ce spectacle a d’ores et déjà bénéficié d’une tournée en province, annonçant à n’en pas douter un beau succès jusqu’au 31 décembre au Théâtre Déjazet !

 

« – Mais enfin, venons en aux faits. Que faire donc, quand on est malade ?
– Rien, mon frère
– Rien ?
– Rien. Il ne faut que demeurer en repos. La nature d’elle-même, quand nous la laissons faire, se tire du désordre où elle est tombée. C’est notre inquiétude, c’est notre impatience qui gâte tout, et presque tous les hommes meurent de leurs remèdes, et non pas de leurs maladies. »

Coutumier des mises en scène de textes contemporains Michel Didym se risque cette fois au classique des classiques signé Molière avec une belle réussite. On retiendra avant tout un beau travail sur la langue qui apparait ici d’une fluidité et d’une modernité épatante permettant à tout un chacun, petits comme grands, de saisir le sens et la mélodie de ce malade imaginaire. Le regard caustique de Molière sur cette société en dysfonctionnement permanent résonne avec force et simplicité, notamment grâce aux prestations millimétrées des comédiens.

André Marcon y campe un Argan exceptionnel, puéril et bougon au possible, face à lui la pétillante Norah Krief rivalise d’énergie et de malice. La scène tant attendue de l’entrée des Diafoirus devient, elle, un moment d’anthologie et provoque dans la salle bondée l’hilarité totale.  Cette adaptation se distingue également par sa mise en lumière des seconds rôles. En effet l’accent est mis sur le détail burlesque des personnages d’Angélique, Béline ou encore Cléante ;  là où ils sont souvent éclipsés dans d’autres créations au profit du tandem explosif Argan-Toinette. C’est donc une partition très équilibrée qui révèle durant deux heures le talent de cette équipe remarquable dans un décor particulièrement soigné. La pièce bénéficie d’une production de poids, notamment du TNS et des Célestins de Lyon, et Jacques Gabel le scénographe a su trouvé le bon écrin avec ce plancher en damier classieux et cette belle harmonie des couleurs.

Quelques parenthèses de folie pure sont distillées ça et là avec les intermèdes musicaux conservés tels quels par Michel Didym, des intermèdes qui permettent de percevoir la clairvoyance de Molière sur le genre humain, son cynisme délicieux. Le spectacle des artistes égyptiens ou encore le conseil des medecins  de la scène finale sont tellement loufoques qu’ils paraissent d’ailleurs rapportés et le spectateur réalise souvent après coup qu’ils sont bien d’origine. C’est là tout l’éclat de Molière, son intemporalité qui le propulse aujourd’hui encore à l’avant de nos plus belles scènes.

Audrey Jean

« Le malade imaginaire » de Molière
Mise en scène de Michel Didym

Avec André Marcon ou Michel Didym, Norah Krief ou Agnès Sourdillon, Jeanne Lepers ou Pauline Huruguen, Catherine Matisse, Bruno Ricci, Jean-Marie Frin, Barthélémy Meridjen ou Francois de Brauer, Jean-Claude Durand ou Didier Sauvegrain, et en alternance une fillette du 3ème arrondissement

Du 3 Novembre au 31 Décembre

Du mardi au samedi à 20h45
Mâtinées les samedis à 16h
Dimanche 24 et 31 à 14h

Théâtre Déjazet 

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