Trois ans après le jubilatoire « Blockbuster » le collectif Mensuel est de retour au Théâtre 71 de Malakoff avec une nouvelle création protéïforme. « Sabordage » spectacle hybride et foisonnant, pointe les dérives de l’ultralibéralisme en se basant sur l’histoire de la plus petite république du monde l’île de Nauru. Une trajectoire fulgurante et dévastée qui synthétise tristement la folie d’un système que rien ne rassasie.  Le Collectif Mensuel nous régale une fois de plus de sa créativité débordante, musique, bruitages, séquences filmées, et maquettes animées seront au service de cette histoire rocambolesque et pourtant tristement véridique.

Incroyable histoire que celle de Nauru et ses habitants. l’île de Nauru est une perle de l’Océanie, un petit paradis, une île dont on va décortiquer le lent et implacable naufrage. Victime de la colonisation tout d’abord, puis d’une exploitation intensive de ressources naturelles, et d’une succession de mauvais choix politiques, l’île et ses habitants sont entraînés dans une spirale de plus en plus violente qui aboutira à un sabordage en bonne et due forme. Un désastre écologique, humain, et politique qui fait froid dans le dos et qui ne manque pas de soulever des interrogations sur les modèles de sociétés que nous souhaitons pour le futur.

C’est encore une fois une réussite absolue sur la forme, le travail du Collectif Mensuel sur ce nouveau spectacle est tout simplement colossal. L’organisation du plateau, les maquettes à modifier, animer et filmer en temps réel, le montage des images d’archives ou d’images de cinéma pour nourrir la narration, tout est encore une fois parfaitement ficelé et impressionnant à observer. C’est une machinerie impeccable qui se met en place, la performance collective est virtuose, tels des fourmis les artistes au plateau fabriquent cet objet dans un vaste capharnaüm d’où émergent les tenants et les aboutissants du désastre économique de Nauru. La remise en question du système libéral, la critique d’un capitalisme forcené et des errances politiciennes tombe terriblement juste, à un moment de notre monde où la question climatique converge avec celle de la trop grande importance donnée aux intérêts économiques. L’interprétation du collectif est également remarquable, leur énergie est séduisante et contagieuse, l’équipe au plateau fait en effet preuve d’une très belle complicité tant dans la gestion des éléments de décor que dans le jeu, les enchaînements musicaux sont eux aussi parfaitement maîtrisés, disons-le ces artistes savent tout faire. C’est donc un spectacle foisonnant et original que le Collectif Mensuel nous offre à voir, et il faut courir au Théâtre 71 Malakoff pour rencontrer ces belges géniaux. Un bémol cependant, le choix d’une fin trop didactique qui gâche un tout petit peu notre plaisir.

Audrey Jean

« Sabordage »
conception et mise en scène Collectif Mensuel
écriture Collectif Mensuel & Nicolas Ancion
avec Sandrine Bergot, Quentin Halloy, Baptiste Isaia, Philippe Lecrenier et Renaud Riga | scénographie et costumes Claudine Maus | direction technique et création lumière Manu 

Théâtre 71 Malakoff 

Mardi 15 octobre à 20h30
Mercredi 16 octobre à 19h30
Jeudi 17 octobre à 19h30

 

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