Le théâtre de la Colline propose actuellement dans une remarquable mise en scène de Daniel Jeanneteau , la ménagerie de verre de Tennessee Williams. Ce spectacle sobre mais en même temps très esthétique reprend avec force les accents de la fureur et du désespoir qui sourdent dans l’œuvre de Tennessee Williams. Se réclamant du deuil et de l’absence, cette œuvre brouille la réalité en la travestissant d’une permanence fantasmatique.

Laura et Tom, les enfants d’Amanda Wingfield. vivotent dans une petite localité du sud des Etats-Unis où la pauvreté a fait son lit. Tom et Laura sont deux jeunes adultes qui partagent leur vie avec Amanda. Leur père s’en est allé un beau jour alors qu’ils étaient jeunes. A l’exception d’une carte postale, ils n’ont plus aucune nouvelle de sa part.

Menagerie de verre

La scénographie très importante nous propose une boite transparente à travers un voile pour mieux souligner les fantasmes qui nourrissent cette famille. Laura, handicapée, passe le clair de son temps à jouer avec sa ménagerie de verre, son ultime refuge qui lui évite de sombrer dans le désespoir. Tom, étouffant dans cette vie, est rempli d’affection pour sa sœur, et lui présente Jim, un jeune collègue qu’il invite le temps d’une soirée. Amanda, à la recherche de sa jeunesse perdue, harcelle ses enfants en déversant sur eux ses propres fantasmes. En se projetant avec une folle énergie, elle entoure Jim, ce nouveau « galant » afin qu’il succombe au charme de Laura. Ce faisant, elle distille une ambiguïté où sa sexualité fait écho à sa survie personnelle. Cette soirée très particulière sera un échec. Laura sombrera alors dans le repli et le désespoir face à une mère qui lui rejettera la responsabilité de cette déception. Tom finira par suivre les traces de son père et quittera définitivement le foyer malgré les réminiscences qu’il ressentira par la suite.

La pièce est traversée par une pesanteur, un verbe en suspend alors que les sentiments sont voilés à travers le prisme fantasmatique d’Amanda. Tenessee Williams se joue de nous en proposant un jeu de miroirs où la réalité s’efface et cède la place au mirage. Tel un magicien, il nous embarque dans une histoire réelle et illusoire à la fois.

Les comédiens sont prodigieux. Dominique Reymond en incarnant une mère dont la pathologie détruit à petits feux ses enfants constitue le pilier cette pièce. Laura, alias Solène Arbel sensible, désespérée, fait preuve d’une sobriété qui donne une efficacité et une forte consistance à son personnage. Olivier Werner, qui joue Tom, en présentant un personnage aux multiples facettes, du narrateur au personnage, met sa sensibilité et sa sobriété au service de cette œuvre magnifique. Une sobriété qui éclabousse cette pièce et qui la rend si belle !

Laurent Schteiner
 
La ménagerie de verre de Tennessee WILLIAMS
Traduction d’Isabelle FAMCHON

Mise en scène et scénographie de Daniel JEANNETEAU
Avec Solène ARBEL, Olivier WERNER, Dominique REYMOND et Pierre PLATHIER

  • Lumières : Pauline GUYONNET
  • Costumes : Olga KARPINSKY
  • Son : Isabelle SUREL
  • Vidéo : Mammar BENRANOU

Théâtre de la COLLINE
15 rue Malte-Brun
Paris 75020
www.colline.fr
Jusqu’au 28 avril à 20h30 du mercredi au samedi, le mardi à 19h30 et le dimanche à 15h30
 

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